Domaines d'étude des Conservatoires botaniques nationaux

 

Les CBN, experts régionaux des richesses végétales et fongiques

Flore, fonge, végétations et habitats naturels sont les sujets consacrés des Conservatoires botaniques nationaux, parmi lesquels les bryophytes, les algues et les lichens offrent un monde singulier à explorer…

 

La flore vasculaire 

Au fondement de l’existence des CBN, les plantes sauvages comptent au premier rang de leurs objets d’étude qu’elles soient indigènes ou exotiques c’est-à-dire importées par le biais d’activités humaines.

Photos : Cypripedium calceolus & Cytisus decumbens (B. Greffier)

À l’échelle de l'hexagone et dans les territoires ultra-marins, la flore vasculaire (qualifiée ainsi en référence aux réseaux de vaisseaux conducteurs de sève) est extrêmement diversifiée sous l’influence des différents climats et des multiples milieux naturels où elle s’exprime. 

Ces espèces végétales, aussi appelées Trachéophytes, regroupent l’ensemble des plantes à graines (les Angiospermes ou plantes à fleurs incluant les arbres, et les Gymnospermes dont les conifères) ainsi que les fougères et plantes apparentées (anciennement Ptéridophytes ou plantes à spores). 

– EN CHIFFRES –
Pas moins de 6 070 espèces de plantes vasculaires (dont 1 088 exotiques) sont répertoriées dans l'hexagone(1) quand plus de 10 000 sont considérées indigènes en Outre-mer (2)

Sur terre, dans l’eau ou sur les milieux rocheux, là où la nature est sauvage mais aussi là où elle a été façonnée par l’homme, les végétaux sont au même titre que le règne animal sous la vigilance des naturalistes. 

Parmi eux, les botanistes œuvrent à améliorer la connaissance, notamment par le biais d’inventaires, pour mettre en évidence des enjeux de conservation de plus en plus prégnants. À partir des indicateurs et menaces qui peuvent ainsi être mis en exergue, les équipes en charge d’engager des actions de conservation prennent alors le relais pour accompagner la mise en œuvre de mesures de préservation et de restauration en partenariat avec les acteurs du territoire, en particulier des Plans nationaux d’action pour les espèces les plus rares et menacées.

 

La fonge

Le règne des Fungi, encore appelés mycètes ou champignons, a rejoint les préoccupations des CBN à travers la rénovation, en 2021, de leurs missions fondamentales (décret d’application n° 2021-762).

Photos : Inocybe napipes (A. Mombert) & Coprinsellus micaceus (P. Collin)

Si des mycologues n’ont pas encore rejoint toutes les équipes des Conservatoires compte tenu des financements qui priorisent encore assez peu ce domaine d’expertise, certains CBN améliorent leurs connaissances avec le concours de multiples partenaires spécialistes et bénévoles issus de sociétés et associations mycologiques. 

– EN CHIFFRES –
En France hexagonale, plus de 27 000 espèces de mycètes sont connues, dont 9 500 champignons dits « à chapeau » (3) ; force est de constater que sous la surface des sols et à des échelles microscopiques un vaste champ d’étude s’étend encore… . 

Avec une classification qui évolue à vive allure, le patrimoine fongique n’en finit pas de révéler ses richesses et sa diversité, non sans laisser apparaître des tendances de raréfaction préoccupantes et des risques importants de disparition pour plusieurs espèces vulnérables ou en danger, voire en danger critique d’extinction dans la nature.

La publication en 2024 de la première Liste rouge des champignons de France métropolitaine qui se concentre pour le moment sur les bolets, lactaires et tricholomes, témoigne des menaces qui pèsent sur ces espèces et leurs habitats. Le manque de connaissance est aussi souligné par l’évaluation qui classe 25% des champignons de ces 3 groupes évalués en catégorie « Données défaillantes » (DD). 

À ce jour, malgré les enjeux, aucun programme de conservation n’est encore dédié à la fonge. Néanmoins les CBN s’organisent, à travers un groupe de travail national, pour concevoir une méthodologie commune dans l’optique de proposer une première liste d’espèces de champignons (et lichens) à la protection en France ; gageons que la Liste rouge et ses autres volets à venir amorcent d’autres nouveaux projets en faveur de la diversité fongique.

 

Les végétations

Les végétations, c’est-à-dire les communautés d’espèces végétales, sont également l’un des domaines d’études réaffirmés en 2021 en lien avec les habitats naturels qui sont depuis toujours au cœur des préoccupations des CBN.

Photos : Habitats naturels (N. Orliac & M. Mangeat)

En prolongement de la botanique, c’est la phytosociologie qui étudie ici les communautés de plantes vasculaires et de bryophytes, les interactions entre elles et avec leur biotope

Cette branche de l’écologie s’appuie sur des inventaires floristiques pour identifier des ensembles de végétaux et décrire les liens fonctionnels entre les communautés d’espèces et les conditions du milieu (substrat, pH, température, humidité, etc.). La phytosociologie cherche ainsi à comprendre et décrire un espace naturel au regard des unités écologiques qui le composent et des trajectoires dynamiques de ses végétations. 

Précisant la caractérisation des habitats naturels, les phytosociologues distinguent, par exemple, différentes formations végétales au sein des forêts alluviales : celles dites mixtes de Chênaies-Ormaies et celles de Saulaies-Peupleraie pionnières. Leurs travaux d’inventaires, de description et de cartographie donnent lieu à la publication de catalogues et cartes de végétation aux échelles régionales et nationales. 

 

Cette connaissance des végétations et des habitats naturels constitue un préalable indispensable pour définir les enjeux de biodiversité d’un territoire afin d’y projeter une gestion conservatoire appropriée et globale au-delà de la situation propre à chacune des espèces qui s’y retrouvent.

 

Les bryophytes, algues et lichens

Diversifiés et abondants dans beaucoup d’écosystèmes, les bryophytes, algues et lichens font également partie des sujets d’étude des CBN. 

Le plus souvent de taille très modeste, ces organismes passent plutôt inaperçus et restent assez peu connus du grand public bien que l’histoire du vivant positionne leurs ancêtres parmi les premières formes de vie primitives... 

Au travers de leurs inventaires, les CBN contribuent au développement des connaissances sur ces composantes non négligeables de la diversité végétale, en s’intéressant à leur état de conservation et à ce qu’elles révèlent sur la qualité des environnements qu’elles peuplent. 

Du fait de leur taille, de leur diversité et de leur complexité d’identification, l’inventaire de ces espèces demeure lent et difficile à mettre en œuvre, mésestimant par conséquent leur réelle rareté et les menaces qui pèsent sur elles… 

Bryophytes

Terrestres et parfois subaquatiques, la bryoflore colonise les milieux dotés d’une certaine humidité tout en supportant très bien les périodes sèches : la plupart des espèces est douée d’une étonnante capacité de reviviscence.

Photos : Cortège d'hépatiques des bois pourrissants & Tetraplodon mnioides (B. Greffier)

– EN CHIFFRES –
Dans l'hexagone, le groupe des bryophytes, des plantes à thalles (fronde) ou à feuilles dépourvues de système vasculaire et de racine, comprend environ 800 espèces de mousses et sphaignes, quelques 300 hépatiques et seulement 4 anthocérotes, sachant qu’au niveau mondial la communauté scientifique estime que ce groupe compte plus de 25 000 espèces..  

Déterminer ces espèces nécessite relativement plus de temps qu’en botanique : après prélèvement sur le terrain, l’observation au microscope s’impose aux bryologues. Comme du côté des mycètes, très peu d’actions de conservation sont engagées à ce jour mis à part dans certains territoires relevant d’aires protégées (sites Natura 2000, parcs nationaux ou naturels régionaux, réserves naturelles, etc.). 

Des listes rouges ont cependant été produites dans différentes régions avec le concours des Conservatoires botaniques nationaux, constituant une première étape de hiérarchisation des responsabilités de conservation. 

Lichens

Concernant les lichens, résultant de la symbiose (coexistence durable à bénéfices mutuels) d’une algue et/ou d’une cyanobactérie et d’un ou plusieurs champignons, les CBN s’attèlent avec les lichénologues à enrichir la connaissance quand des yeux inexpérimentés ne remarquent même pas la présence de ces espèces pionnières. 

Photos : Ramalina fastigiata (J. Amiotte-Suchet) & Cetraria sepincola (Y. Ferrez)

Colonisant les milieux au rythme d'une croissance extrêmement lente en plus d’être capables de stopper tout métabolisme à l'état sec pour reprendre une vie active lorsqu'ils se réhydratent, certains lichens pourraient vivre jusqu'à plusieurs siècles si les conditions écologiques et climatiques sont favorables... 

Algues d'eaux douces

Les algues d’eaux douces font aussi l’objet d’études menées par les CBN qui ont développé une expertise en phycologie. 

Avec une quarantaine d’espèces répertoriées en France hexagonale (en particulier les Charophytes), ces végétaux s’avèrent largement moins connus que les plantes terrestres certainement parce qu’ils sont plus difficiles à déterminer et qu’ils nécessitent de mobiliser des moyens adaptés à leur observation. 

Photos : Nitella capillaris (H. Michaud) & Tolypella hispanica (B. Huynh-Tan)

Si la connaissance se développe en continue, bryophytes, algues, lichens et champignons, apparaissent ainsi comme des sujets d’étude restant à explorer davantage. Certaines espèces sont d’ailleurs considérées comme de précieux indicateurs pouvant être utilisés à des fins de biosurveillance pour évaluer la santé des écosystèmes, la qualité de l'air et des eaux. 

 

Notes

  • (1) Gourvil J., Millet J., Perera S. et A. Reteau (Coord.) 2019. La flore menacée de France métropolitaine. Dossier de presse. Conservatoires botaniques nationaux – Agence française pour la biodiversité, 28 p. >> Consulter
  • (2 ; 3) Gilg O., Roche A., Figuet S., Robert S., Barnier F., Witte I., Poncet L. et Touroult J. (Coord.) 2019. Le patrimoine naturel en France et dans les Réserves naturelles : état des lieux. Réserves Naturelles de France – UMS PatriNat (AFB-CNRS-MNHN), Dijon, 44 p.
    >> Consulter

 

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